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“Cette a crise a démontré l’efficacité des corps intermédiaires”, Pierre Jardon, conseiller confédéral

20 mai 2020 | Social

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Crédit photographique : Kelly Sikkema

La production agricole française s’est maintenue tout au long de la crise malgré les restrictions sanitaires et de déplacement. Pierre Jardon, conseiller confédéral CFTC en charge du dialogue social, et affilié à la fédération agriculture, revient sur le contexte et les conditions de cette réactivité.

Quels ont été les effets de la crise du Covid-19 sur le monde agricole ?

Jusqu’à la veille de la crise, nous importions beaucoup de produits frais de l’étranger. Ces produits importés n’ont pas à respecter les normes sociales, sanitaires et environnementales qui sont, non sans raison d’ailleurs, imposées aux produits français. Ils sont, en conséquence, moins coûteux. Leur disparition des étals a donc pu donner l’impression d’une hausse des prix. Mais ce qu’il faut d’abord remarquer, c’est la continuité sans faille de l’approvisionnement sur la base d’une production française ! Cela, alors même que les frontières étaient fermées. La production locale peut donc satisfaire les besoins, quand elle ne doit pas faire face à une forme de concurrence déloyale. Ce ne sont pas les produits français qui sont “chers”, mais les autres qui ne le sont pas suffisamment. C’est un fait : d’un côté, on impose en France des normes de haut niveau, de l’autre on importe des produits à bas coûts qui ne respectent pas du tout les mêmes règles. La crise met en lumière ces aberrations.

Cela contribue-t-il à changer l’image de l’agriculture en France ?

Avant la crise, le monde agricole était clairement montré du doigt. À tel point qu’on a pu parler d’« agri-bashing »*. Sur ce plan, on a tout entendu : que l’agriculture polluait, qu’elle utilisait des produits dangereux, qu’elle ne respectait pas le bien-être animal… Avec à la clé de nombreux reportages à charge. Bref, on nous a dit que l’agriculture, ça n’allait pas, que ce n’était vraiment pas bien.

Et puis surgit cette crise, et alors le bashing a laissé place aux applaudissements. On ne va pas s’en plaindre, mais il y a bel et bien eu un revirement de situation. Il me semble notamment que l’on est en train de dépasser l’opposition entre les agricultures. À l’agriculture productiviste et conventionnelle, a beaucoup été opposée l’agriculture biologique, en circuit court. Mais dorénavant c’est le blason de l’agriculture, en général, dans son ensemble, qui est redoré. On réalise aujourd’hui en effet que nous avons besoin des deux agricultures, l’une pour nourrir et produire en quantité suffisante et exporter, l’autre pour répondre aux nouvelles demandes, en matière de bio et de circuits courts. L’enjeu est de rendre l’ensemble du système agricole plus vertueux, et l’on a déjà fait beaucoup de progrès de ce point de vue.

Cette revalorisation de l’image de l’agriculture a-t-elle des conséquences sur l’emploi ?

L’économie agricole française, c’est 1 million de travailleurs saisonniers par an, dont 200.000 sur la période de la crise sanitaire (mars, avril et mai, NDLR). Habituellement, une grande partie de ces travailleurs sont étrangers. Or des restrictions de déplacement ont été imposées aux populations. C’est pourquoi les exploitants ont craint de ne pas être en mesure de recruter suffisamment. Le monde agricole s’est demandé si les récoltes allaient pouvoir être assurées cette année.

D’où l’initiative “Des bras pour ton assiette”, relayée par la fédération CFTC Agri et la Confédération. Il s’agit d’une plateforme de mise en relation entre deux catégories de personnes. D’une part, des salariés en activité partielle qui souhaiteraient travailler dans les champs. D’autre part, des exploitations ne parvenant pas à trouver des saisonniers. Afin d’assurer l’attractivité de l’opération pour les salariés, la CFTC a demandé qu’il soit possible de cumuler les indemnités d’activité partielle avec le revenu de l’activité agricole saisonnière. C’est un dispositif qui existe peu ou prou déjà pour les vendanges. Eh bien cette plateforme a rencontré un franc succès, avec 200 000 à 240 000 inscrits. C’était une grande surprise pour le monde agricole lui-même. Certes, le nombre d’inscrits est supérieur au nombre de contrats effectivement signés, et tous les candidats n’ont pas persévéré. Mais cela témoigne de l’attractivité du secteur. Il y a un potentiel.

De quoi lancer une dynamique de relocalisation de l’emploi ?

Disons qu’une prise de conscience a eu lieu à ce niveau-là. L’initiative a en effet montré que le secteur pouvait générer de l’emploi localement. C’est une bonne chose pour nous, partenaires sociaux, à un moment où l’on négocie une convention collective nationale en agriculture. Cela va nous permettre de plaider pour une revalorisation visant à attirer les travailleurs français. C’est important car, au-delà des saisonniers, il y a également une difficulté à recruter des permanents. En capitalisant sur l’image redorée de l’agriculture, on peut espérer attirer à nouveau les gens vers ces métiers-là.

Comment expliquez-vous la réactivité du monde agricole face à cette crise ?

La coopération des corps intermédiaires en est la principale raison. Dans l’agriculture, le maillage territorial du paritarisme et du dialogue social est très développé, pour des raisons historiques. Cela forme un réseau très réactif de personnes habituées à coopérer.

C’est le cas, notamment, dans les organismes paritaires. L’initiative “Des bras pour ton assiette” en est une illustration. L’ANEFA (Association nationale de l’emploi et de la formation en agriculture, NDLR), une organisation où siègent des représentants de la CFTC, compte en effet au rang des initiateurs. Mais ce n’est pas tout. Agrica a immédiatement lancé un dispositif d’accompagnement personnalisé et de soutien financier. Cet organisme de protection sociale complémentaire du secteur compte, là aussi, des mandatés CFTC. Idem à la MSA (Mutuelle sociale agricole, NDLR), qui, entre autres, a mis en place un dispositif d’écoute et de soutien psychologique : Agri’écoute. De nombreux dispositifs d’accompagnement des entreprises et des salariés ont ainsi vu le jour dans la concertation, très rapidement. Les organismes de formation et Action logement ont pris des dispositions également. On est loin des idées reçues véhiculées par les détracteurs du paritarisme ! Ici, c’est l’efficacité et la réactivité qui priment.

Le dialogue social, de son côté, a démontré qu’il permettait d’apporter rapidement des réponses aussi concrètes qu’un protocole sanitaire pour la production agricole, par exemple. Dans les instances, on se nourrit des idées des uns et des autres. Il y a eu une multitude de négociations, avec des contreparties concédées de part et d’autre. La CFTC Agri a demandé dès le départ que tout se passe dans la concertation, et les organisations patronales ont répondu présent, sans discuter. Toutes les semaines, il y a eu un point sur la situation économique et sanitaire. Les relations institutionnelles, avec les ministères du Travail et de l’Agriculture, n’ont pas été en reste. Les organisations des salariés ont été entendues. Leur rôle a été reconnu. S’il y avait une leçon à retenir, c’est vraiment que cette crise a démontré l’efficacité des corps intermédiaires.

* le bashing, de l’anglais “agresser”, désigne une entreprise de dénigrement systématique, notamment sur internet et les réseaux sociaux

Vers une PAC agroécologique

La politique agricole commune (PAC) est une politique publique de soutien à l’agriculture, élaborée à l’échelle européenne. Chaque PAC est pluriannuelle (la dernière couvre les années 2015-2020). La prochaine PAC était en cours de négociation quand la crise sanitaire a éclaté. Son objectif avoué est d’adopter une perspective “agroécologique”.
Dans ce cadre, la CFTC milite pour un changement des règles d’attributions des aides. Actuellement, ces dernières sont versées “à l’hectare”, c’est-à-dire que les plus grandes exploitations (en surface), touchent davantage d’aide. Ce système favorise les grandes cultures céréalières. Pour la CFTC, il serait plus bénéfique, à la fois pour l’emploi et pour l’environnement, d’attribuer les aides “à l’actif”, c’est-à-dire en fonction du nombre de salariés sur l’exploitation. En procédant de la sorte, on aiderait davantage les maraîchers qui travaillent souvent en circuit court et qui emploient de nombreux ouvriers.
Cette PAC sera également l’occasion d’une concertation publique, pour laquelle la CFTC produira des argumentaires. Une étude, menée en partenariat avec la Revue Projet, du CERAS, est par ailleurs en cours de réalisation.

Crédit photographique Une :  Kelly Sikkema

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